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Solde de la taxe d’apprentissage hors de contrôle ?

  • Photo du rédacteur: Laurent Riquelme
    Laurent Riquelme
  • 22 janv.
  • 5 min de lecture

Nous sommes régulièrement consultés sur les conditions de perception et d’utilisation du solde de la taxe d’apprentissage dans le secteur de l’enseignement et de la formation.

Nous avons donc décidé, ce coup-ci, de faire un petit point sur le solde de la taxe d’apprentissage, ainsi que sur le contrôle de son utilisation.

Vous allez voir, c’est facile et simple à comprendre pour ceux qui ne seraient pas initiés.

Les entreprises versent à l’URSSAF une taxe d’apprentissage égale à 0,68 % de leur masse salariale (cumul des rémunérations brutes des salariés).


Cette taxe d’apprentissage est décomposée en deux fractions :


  • Une fraction principale égale à 0,59 % destinée à financer les formations en apprentissage (via les opérateurs de compétences dits « OPCO » qui financent les formations en CFA),

  • Une fraction correspondant au « solde » de la taxe d’apprentissage à hauteur de 0,09 % destinée à financer notamment les formations initiales hors apprentissage sanctionnées par un diplôme ou un titre RNCP


C’est ce solde de 0,09 % qui nous intéresse ici !


Le processus est simple : les entreprises ont le choix de verser le « solde » susvisé de 0,09 % à l’URSSAF de façon indifférenciée ou de viser un ou plusieurs établissements d’enseignement supérieur bénéficiaires (par l’intermédiaire d’un service dématérialisé dénommé « SOLTEA », géré par la Caisse des Dépôts et Consignations).

La loi limite les établissements éligibles à la perception du solde la taxe d’apprentissage versé par les entreprises : une liste exhaustive est prévue à l’article L. 6241-5 du code du travail.

Cette liste fait notamment référence aux établissements d’enseignement privés relevant de l’enseignement supérieur et gérés par des organismes à but non lucratif (dans la plupart des cas une association régie par la loi du 1er juillet 1901).



Pourquoi viser uniquement les organismes à but non lucratif pour le secteur privé ? 

Bah… la réponse est facile : l’Etat souhaite éviter que le solde de la taxe d’apprentissage finisse plus ou moins dans la poche des actionnaires de sociétés commerciales !

Dans une association loi 1901, s’il y a des bénéfices à la fin de l’année, ils ne sont pas distribués, mais conservés par l’association ou réinvestis dans l’intérêt de l’association.





Cette règle est élémentaire lorsque l’on parle du solde de la taxe d’apprentissage : les établissements d’enseignement supérieur privé gérés par des sociétés commerciales (appartenant souvent à des groupes de sociétés commerciales) ne sont évidemment pas éligibles à la perception du solde de la taxe d’apprentissage.


Il existe un contrôle de l’Etat a priori afin d’opérer un premier filtre : les établissements éligibles (organismes à but non lucratif – association Loi 1901) qui souhaitent bénéficier de versements au titre du solde de la taxe d’apprentissage (via la plateforme SOLTEA) doivent opérer une déclaration annuelle spécifique des formations initiales dispensées auprès du Préfet de Région, aux fins de figurer sur une liste régionale des établissements habilités à percevoir le solde de la taxe d’apprentissage.




Attention, il y a un piège pour les non-initiés : contrairement à ce que son nom indique, le solde de la taxe d’apprentissage (0,09 % de la masse salariale) ne sert pas à financer des formations en apprentissage, mais seulement des formations initiales hors apprentissage.

Il s’agit donc de formations initiales suivies par des étudiants qui financent eux-mêmes leurs études, avec un diplôme ou un titre RNCP venant sanctionner le parcours de formation initiale.


Attention, attention, il y a une autre subtilité : il doit s’agir de formations initiales dispensées à temps complet et de manière continue.

Pas question de viser des cycles de formation initiale de courte durée !



Dernier critère important : le solde de la taxe d’apprentissage ne peut être utilisé que pour exposer des dépenses qui permettent de « financer le développement des formations initiales technologiques et professionnelles hors apprentissage ») (en application de l’article L. 6241-4 du code du travail).

Par conséquent, seules les dépenses afférentes au développement des formations initiales sont concernées, ce qui signifie, par exemple, que les dépenses de fonctionnement de l’établissement ne peuvent pas être financées avec les produits provenant du solde de la taxe d’apprentissage.




Vous avez tout bien suivi et compris : bravo !


 Récapitulons ici les conditions essentielles :


  • Un organisme à but non lucratif,

  • Un établissement privé relevant de l’enseignement supérieur (enregistré en tant que tel auprès du Rectorat territorialement compétent),

  • Une ou plusieurs formation(s) initiale(s) (hors apprentissage) sanctionnée(s) par un titre ou un diplôme enregistré au RNCP, et dispensée(s) à temps complet et de manière continue,

  • Une inscription sur la liste régionale dressée par le Préfet de Région et sur la plateforme SOLTEA,

  • Des produits utilisés pour des dépenses de développement desdites formations initiales.


En pratique, nous constatons que ces conditions ne sont pas toujours respectées, et ce, depuis de nombreuses années…


En effet, certains organismes à but non lucratif entretiennent des liens économiques trop étroits avec une société commerciale ou un groupe de sociétés commerciales gérant des activités d’enseignement et de formation, au point que l’organisme à but non lucratif est parfois affiché comme appartenant audit groupe… (ce qui caractérise un comportement décomplexé particulièrement périlleux, puisqu’une association loi 1901 n’appartient par définition à personne, et surtout pas à un groupe de sociétés commerciales).





Par pitié, attention aux organigrammes au sein des groupes de sociétés commerciales… car cela revient à dire que certaines sociétés commerciales (ou certains groupes de sociétés commerciales) du secteur de l’enseignement et de la formation se servent d’un prétendu organisme à but non lucratif, créé spécifiquement par leurs soins, pour bénéficier in fine elles-mêmes des produits du solde de la taxe d’apprentissage, de façon plus ou moins directe, partielle ou discrète.

Il est parfois nécessaire de rappeler que seuls les organismes à but non lucratif gérant un véritable établissement d’enseignement relevant de l’enseignement supérieur (avec notamment de réelles formations, de réels étudiants et de réels enseignants) sont éligibles.

Il est aussi opportun de rappeler que les produits du solde de la taxe n’ont pas vocation à financer des dépenses qui bénéficient in fine au développement de la société commerciale(ou du groupe de sociétés commerciales) qui est à l’origine de la création dudit organisme à but non lucratif.

C’est important de se rappeler que les organismes à but non lucratif (association Loi 1901) éligibles ne peuvent pas favoriser (directement ou indirectement) des sociétés commerciales non éligibles lorsqu’elles utilisent les produits du solde de la taxe.

Les autorités publiques en charge du contrôle le savent fort bien, mais n’exercent à l’heure actuelle aucun contrôle à notre connaissance. Des contrôles existent sûrement mais, compte tenu de notre connaissance du secteur, ils sont certainement isolés car, à notre modeste niveau, nous n’en avons pas connu au cours de ces dernières années.

Le but de la présente n’est pas de réveiller les contrôles, mais plutôt de rappeler à tous les opérateurs que, par les temps qui courent, il est temps de se préparer aux éventuels contrôles qui auront lieu tôt ou tard sur les conditions de perception et d’utilisation du solde de la taxe d’apprentissage.

Nous constatons que ces sujets sont souvent sous-évalués par la plupart des opérateurs, notamment par rapport aux conséquences pénales qui peuvent en découler pour les dirigeants de sociétés commerciales qui sont à la manœuvre, au-delà des obligations de remboursement des sommes perçues.


Pas vu, pas pris, mais jusqu’à quand ?




Nous n’avons pas la réponse mais le sujet nous paraît être très inquiétant à l’heure où la France est lestée de plus de 3 300 milliards d’euros de dettes.

Avec un tel affaiblissement des finances publiques, il serait fort imprudent de miser sur une taxe d’apprentissage hors de contrôle…

Comme souvent, nous pensons qu’il vaut mieux prévenir que guérir.

C’est dans cette perspective que nous avons mis au point la présente chronique, en espérant qu’elle vous sera utile…





 
 
 

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